Sans que je ne m’en rende compte je me retrouvais sur une mission affreuse, encore pire que celle de la vieille et des rats… Surveiller une bibliothèque sur deux jours, et la ranger… Enfin, on m’avait promis que je ne serais pas seul… Alors qu’importait donc que je sois dans cet endroit ennuyeux à mourir. Je me préparais tôt ce matin-là, juste pour être à l’heure. J’étais en place d’ailleurs en même temps que les premiers rayons du soleil. Le temps filait lentement et je me demandais quand est-ce que la personne m’accompagnant se pointerait. Et le temps passait, toujours lentement, comme si il souhaitait s’étirer et se rire de moi et ma lassitude. Soudain, je vis une jeune femme passer parmi les passants.

Elle n’était pas très grande, et portait une robe jaune… Pourtant le sabre qu’elle portait était plus que visible et sa façon de se mouvoir, c’était un ninja. Dans un petit mouvement discret je me saisissais du manche de ma faux, si elle était là pour foutre le bordel aurait une belle surprise. Mais elle semblait avoir encore la bouche pleine, ce détail me sauta aux yeux lorsqu’elle arriva un peu plus près… Finalement c’était elle… Ma camarade. Je m’approchais d’elle d’un pas désinvolte et le regard empli de mon habituelle  envie de sang.

« Bonjour… On dirait que la ponctualité n’est pas ta caractéristique principale hein ? Bon aller, je pense qu’on ferait mieux de s’y mettre ça me gonfle déjà. »

Je fis demi-tour immédiatement, me dirigeant vers la bibliothèque, et une fois dans le hall je me surpris à sentir un sourire s’étirer sur mon visage et à susurrer.

« Aller, je t’en prie n’hésite pas à dégainer… Je t’attends avec impatience. »

Un léger raclement de gorge avant de reprendre la parole d’un ton plus neutre.

« Moi c’est Laudius… Et toi ? »

Bien qu’elle semblait un peu plus jeune que moi, je doutais qu’elle se formalise d’une marque de familiaritée… Et si tel était le cas, dommage.

« Mitsunari Nozomi … »

Un temps de silence plus qu’explicite, oui… Elle avait autant envie de rester ici que moi. Mais pas pour les mêmes raisons sans doute. J’entrais directement, connaissant plus ou moins comment s’organisait une bibliothèque. Ce n’était pas spécialement compliqué non plus.

J’entrais sans même remarquée la bibliothécaire présente. Je commençais à me mettre au travail, rangeant les livres par paquets, ramassant ceux à terre… Sans me poser de question, sans même faire attention à ma camarade. Je ne pouvais cependant l’ignorer longtemps. D’une part elle était là, avec moi, et d’autre part elle ne serait probablement pas muette longtemps.

« Eh beh… En tout cas belle lame… Du moins à première vue. Je présuppose que tu sais la manier… Enfin j’espère que ce n’est pas que de la décoration. »

Je remettais ma faux en place par pur réflexe, pas dans l’intention de dégainer. Certainement pas pour elle en tout cas, ce n’était pas spécialement le moment.
La bibliothécaire arriva d’un seul coup dans les lieux, trop silencieusement, sans un bruit… Même un fantôme aurait été moins discret. Le soucis étant que j’étais perché sur une étagère entrain de ranger quelques livres… Je fis l’erreur peut-être de détourner mon regard pour la voir arriver…

Lentement je sentis les livres me glisser des bras, le temps sembla se ralentir, presque s’arrêter. Les livres chutaient vers la jeune bibliothécaire. Je sautais, toujours à mes yeux d’une lenteur incroyable… Je dégainais ma faux et de la chaîne je tentais de dégager les livres… Malheureusement les mouvements étaient trop aléatoires, ma chaîne passa à entre les livres… Le poids dirigé à cette vitesse pourrait largement être mortel s’il touchait certaines parties du crâne. Alors dans un moment de panique je criais le nom de la jeune femme.

« Nozomi ! »

Soit elle comprenait et elle la sauvait, soit elle mourrait…

Vous vous demandez peut-être pourquoi je n’utilisais pas mes jutsu défensif, la raison était très simple, étant des jutsus fûton, imaginez une tornade dans une bibliothèque… Je nous aurais offert du travail supplémentaire pour rien… Bref, revenons au sujet… Le temps était presque figé à mes yeux…

L’appréhension était en moi, imaginez trois secondes si je touchais… Les conséquences, il me faudrait alors trouver le moyen de justifier cet acte, et je n’y arriverais pas, c’était certain.

La vie n’était pas un long fleuve tranquille, et les aléas de la vie font en sortes qu’elle soit plus palpitante. Heureusement pour moi, Nozomi fût réactive. Mon poids dévia, l’impact fût en conséquence dévié à l’épaule qui se déboîta avec un craquement sonore. D’un saut je me retrouvais non loin de la bibliothécaire, Nozomi me regardait d’un regard haineux. Et alors ? J’avais tenté de limiter les dégâts, c’était fiasco. Je regardais ma collègue œuvré, elle maîtrisait la médecine, acte rare… Et bien entendu, durant son travail elle m’insulta copieusement… De même la bibliothécaire enchaîna… Je ne pouvais pas continuer à encaisser infiniment, je pris donc sur moi pour répondre calmement…

« Calmez-vous toute les deux ! Je suis désolé, j’ai tenté de limiter les dommages lors de la chute des livres…  Les mouvements imprévisibles le resteront. Sur-ce, la mission est un échec. Je ne vous apporterais pas de solution, mais tenir une bibliothèque est à la portée de n’importe qui. Sur-ce adieu… puissiez-vous survivre encore un peu… Ma faux jouera un jour sur votre gorge. »

Je m’en allais d’un pas vif, l’excitation s’ancrait en moi. Si l’une d’entre-elle me suivait je décidais d’éliminer les menaces. Je n’en avais tellement marre. Me faire prendre de haut lorsque je venais pour rendre service au départ… Dans ce cas inutile d’insister, je ne rendrais plus ces services, ma place n’était pas d’aider les autres… La première partie de mon plan tombait à l’eau… Je m’en sortirais… Seul. Nozomi était déjà une quantité négligeable. Peut-être serait-elle un jour amenée à m’affronter, j’en prenais déjà de plaisir d’avance.

Je m’éloignais d’un pas nonchalant, il me fallait oublier tout ça, le village également…  Plus de contact avec qui que ce soit, vivre en solitaire et progresser… Mon nindô, la voie de la destruction… Je faisais déjà mes adieux à ce corps, et à ceux qui partiraient avant. Peut-être aussi après. Il me fallait trouver des compagnons, il me faudrait aller au-delà du raisonnable. Convaincre serait peut-être et sûrement ma seule force.

Je rêvais déjà de cet ailleurs, de ce monde sur son déclin. Oui, je voulais être l’auteur de ce massacre, de tout cela. Oui, une folle idée me traversait l’esprit… Un jour peut-être je vaincrais… Pour le moment j’étais faible et pathétique… Oui, adieu Nozomi et adieu Suna.